vendredi 1 juin 2012

L'écrit comme réponse à l'injustice


L'émigration comme réponse à la faim
 Les femmes et les jeunes constituent l'immense majorité de la population qui, au Mali comme dans la quasi-totalité des pays africains, peut imprimer une nouvelle orientation au développement de leur continent d'autant plus que leurs sorts sont liés.
Le lien qui unit le couple mère -enfant semble se maintenir et faire la force de la relation entre les femmes africaines et leurs enfants devenus grands. Telle est l'une des dimensions cachées de l'émigration clandestine et forcée dont témoignent des jeunes maliens, refoulés en 2005 des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. A la question "Pourquoi tenter de franchir les frontières de l'Europe au risque de sa vie ?", l'un d'entre eux répond ainsi "Pour ne plus voir ma mère vivre avec la faim au ventre". La prise en charge de cette réponse simple mais essentielle s'impose en vue de donner aux changements qui s'imposent du sens ainsi que l'ancrage culturel nécessaire.
 Mais alors que le monde est dit libre et ouvert, la perspective pourles Africains et les Africaines de vivre dignement de leur travail et de circuler librement dans les pays d'accueil s'éloigne de jour en jour.
 Voici qu'après la flambée du prix du baril de pétrole et des denrées alimentaires ainsi que le réchauffement climatique viennent s'ajouter à ce dilemme la crise financière. Les émeutes de la faim se sont inscrites dans un environnement mondial où les politiques migratoires se durcissent. Le tri auquel les pays riches procèdent drainent les cerveaux vers le Nord en laissant aux pays d'origine lesoin de gérer la grogne et la faim des laissés pour compte dont les femmes et les jeunes constituent l'immense majorité. Cette doubleréalité – la faim et l'émigration – est un énorme défi à la mondialisation néolibérale qui est rarement questionnée quant aux maux de l'Afrique. Selon la pensée dominante, il faut au contraire poursuivre et approfondir les privatisations et les libéralisations qui sont en cours depuis plus de trois décennies dans la plupart des pays africains afin de contrer la faim et d'impulser la croissance.
 Cette thèse qui est largement partagée par les décideurs africains et leurs partenaires techniques et financiers est à l'origine de la plupart des échecs des projets et programmes mis en oeuvre.
 Les acteurs et actrices de la nouvelle société civile internationale critique dont émane l'association des étudiants de l'International University College of Turin, estiment que l'Afrique surprendra agréablement le monde le jour où démocratiquement élus, ses dirigeants se mettront à l'écoute de leurs peuples, en l'occurrenceles femmes et les jeunes, les éduqueront, choisiront et mettront en œuvre avec eux des politiques de transformations économiques, sociales et culturelles conformes à leurs aspirations profondes. Cette belle perspective, qui est au cœur de la présente initiative de la nouvelle génération d'intellectuelle dont dépendra certainement le futur fructueux, égal et juste d'une société mondiale avec un ordre économique mondial mettant l'humain au centre de ses décisions et militant pour une juste redistribution des ressources et des richesses, est le défi à relever.
Elle exige une vision nouvelle qui réconcilie les Africains avec eux-mêmes, entre eux, avec leur continent et avec le reste du monde.
 Ce travail gigantesque se fera sans doute par le biais de la reconstruction qui est imminente, pressante et ne peut attendre car d'elle dépendra l'avenir des millions de jeunes d'Afrique et de ceux du reste du monde entier dans un contexte de globalisation. Alors c'est pourquoi s'impose  La reconstruction comme vision stratégique
 L'état des lieux qui résulte des cinq dernières décennies de transformation des économies et des sociétés africaines fait appel à la reconstruction comme vision stratégique. L'état de santé, leniveau d'éducation et l'alimentation des populations ainsi que l'aspect des terroirs et de la plupart des infrastructures de base (habitat, écoles, centres de santé, marchés…) portent la marque d'un processus de dépossession des Africains de leurs destins, de destruction des économies locales et des écosystèmes à la faveur d'un développement extraverti et dépendant.
 L'ouverture totale des économies africaines au marché mondial qui se veut libre et concurrentiel, est au centre des conditionnalités du financement de l'agriculture de l'éducation, la santé et du développement en général. Les cultures de rente (coton, café, cacao, arachide, thé…), auront bénéficié de l'attention et des ressources des Etats postcoloniaux au détriment de la satisfaction des besoins des populations en denrées alimentaires. Les nombreuses mises en garde et le plaidoyer du mouvement paysan et de la société civile critique quant au coût social, économique, politique et écologique de cette ouverture des économies chancelantes d'Afrique à la compétition sous la contrainte, ont rarement été entendues. Aussi, assistons-nous aujourd'hui à une dégradation plus prononcée des conditions de vie des populations et à une marginalisation plus poussée des petits producteurs dontles femmes et les jeunes.
 Face à cette évolution dramatique de l'agriculture paysanne africaine, les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) et les agro -carburants, bien que contestables et contestés dans l'hémisphère Nord, sont présentés en Afrique, comme une réponse à la faim et la pauvreté. Il s'agit, en réalité, d'aller plus loin dans la dépendance technologique et alimentaire du continent dont l'une des traductions est la dépossession des paysans des semences et deleurs terres.
 Le détournement de l'agriculture africaine de sa fonction nourricière au profit d'un marché mondial prétendument libre et concurrentiel mais en réalité déloyal si l'on considère entre autresles subventions agricoles des pays riches à leurs propres productions. Concurrencés par des biens importés souvent subventionnés, les produits locaux tendent à disparaître. Cette évolution a considérablement nui à la capacité du continent à créer des industries centrées sur la transformation de ses produits, des emplois et à se nourrir.
 La perte de sens et de connaissances ainsi que la faibleparticipation des populations à l'analyse de leurs propres situations et aux prises de décisions découlent elles-aussi de l'extraversion économique. L'utilisation, souvent sans précaution, des intrants chimiques dans l'agriculture, engendre quant à elledes maladies plus ou moins graves (allergies, troubles neurologiques et hormonaux, cancers…), alors que les soins médicaux sont inaccessibles pour les mêmes couches sociales qui sont frappées de plein fouet par la ruine de l'agriculture africaine. En conclusion je dirai que les dimensions de la reconstruction qui s'impose au regard de cette situation revêt au moins trois dimensions :
celle des personnes souvent démunies et désemparées faute de travail, de revenu, de repères et de perspectives d'avenir;
la consolidation de ce qui reste du lien social souvent ébranlé par les difficultés de la survie;
les terroirs et les infrastructures de base dont l'état de délabrement et d'abandon a un lien avec le manque de motivation et souvent d'estime en soi.

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